RIE III : une chance à saisir

par Stéphanie Ruegsegger, Directrice politique générale, FER Genève.

Nous n’avons certes pas vraiment le choix. La réforme de l’imposition des entreprises (RIE III) est en effet nécessaire si la Suisse veut se conformer aux standards internationaux en matière fiscale et ne pas être mise au  ban de la communauté internationale, ce qui serait économiquement très préjudiciable à notre pays. Cette réforme, sur laquelle le Conseil fédéral a ouvert une consultation jusqu’à fin janvier, est aussi et avant tout une chance.

La RIE III vise principalement la suppression des régimes fiscaux spéciaux, communément appelés « statuts ». Ceux-ci concernent avant tout de grandes entreprises axées sur l’international (quartiers généraux d’entreprises multinationales, secteur du négoce ou encore industrie chimique), qui bénéficient ainsi jusqu’à présent d’une fiscalité allégée. D’une manière générale, la réforme proposée doit permettre à notre pays d’assurer la sécurité juridique de son système fiscal. Elle doit par ailleurs maintenir et améliorer la compétitivité de notre pays et respecter le principe du fédéralisme, en laissant aux cantons la liberté de choisir les outils de leur politique fiscale.

Dans le cadre de sa consultation, le Conseil fédéral a proposé toute une série de mesures, plus ou moins en lien avec la suppression des statuts. Une sorte de liste au père Noël, dont les différents éléments sont susceptibles de plaire pour partie aux uns et aux autres … mais dont l’ensemble pourrait in fine diviser le pays. La FER (Fédération des entreprises romandes) estime par conséquent nécessaire que les mesures retenues soient en lien direct avec la suppression des statuts (comme par exemple la licence box), et qu’elles ne soient pas de nature à empêcher les cantons de baisser leur taux d’imposition sur le bénéfice ou à la retarder.

Dans certains cantons, la RIE III nécessitera des ajustements importants. C’est notamment le cas de Genève, Vaud et Fribourg, dont le taux de fiscalité ordinaire des entreprises est élevé. Pour le premier, les sociétés au bénéfice de statuts fiscaux représentent une part importante de l’économie du canton, à savoir plus de 35’000 emplois directs et indirects et plus de 1 milliard de recettes fiscales. La contribution de ces entreprises au pot commun fédéral est également loin d’être négligeable, que ce soit par le biais de la péréquation ou de l’impôt fédéral direct. La Confédération, tout comme les cantons qui bénéficient de cette manne, sont donc aussi concernés par les répercussions de la réforme sur Genève.

La Confédération a bien perçu l’enjeu, elle dont la moitié des recettes de l’impôt sur le bénéfice des entreprises provient des entreprises sous statuts fiscaux. C’est la raison pour laquelle elle propose de compenser financièrement les cantons à hauteur de la moitié du coût de la réforme, soit1 milliard de francs. Une charité certes intéressée, mais néanmoins bienvenue. Ce qui l’est moins, c’est que cette participation est insuffisante et se fera selon le principe de l’arrosoir, et non de manière ciblée, en fonction de l’effort consenti par les différents cantons. Une situation non seulement préjudiciable à la région lémanique, dont on sait que l’effort sera particulièrement lourd, mais qui pourrait permettre à certains cantons peu ou pas concernés par la RIE III d’alléger leur fiscalité. Un effet d’aubaine d’autant plus choquant que certains d’entre eux sont bénéficiaires de la péréquation financière.

La FER a donc invité le Conseil fédéral à corriger sa copie, en ciblant la réforme sur des mesures visant à compenser la suppression des statuts, qui soient conformes aux règles internationales, qui évitent les effets d’aubaine et qui soient respectueuses du fédéralisme.

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